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FIFOG 2015 : « Bastardo » de Nejib Belkadhi, un conte social fantastique et initiatique réalisé avec finesse

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« Bastardo », premier long-métrage fiction de Nejib Belkadhi, a reçu le prix du meilleur film dans plusieurs festivals. Belle reconnaissance pour cette œuvre émouvante, drôle et efficace.

Salah trouve un enfant dans une poubelle, qu’il élèvera comme son fils. 30 ans plus tard,  Mohsen, alias Bastardo, s’associe avec son ami Khélifa, après avoir perdu son travail. Ils installent une antenne-relais pour permettre aux habitants du quartier d’utiliser un téléphone portable, contre une rémunération conséquente. Certes, Mohsen améliorera ainsi sa situation financière et prendra sa revanche sur les moqueries dont il était jusqu’ici l’objet. Mais le caïd du quartier ne verra pas cette initiative d’un bon œil.

«Bastardo» est une très belle réussite mélangeant habilement les difficultés sociales, économiques et les dérives du monde moderne. Il plonge dans l’univers du film d’action qui tourne autour d’un caïd. Œuvre touchante aux personnages truculents, le réalisateur y ajoute même quelques accents felliniens avec l’aspect «monstrueux» et «grotesque» de la mère du caïd du quartier. La légère touche fantastique prend corps à l’apparition du fantôme de Khélifa, l’ami de Mohsen. L’aspect surréaliste du conte sympathique en est tiré.

Ce long-métrage est également le parcours initiatique d’un homme qui prend sa revanche sur la vie parce qu’elle ne lui avait pas fait de cadeaux jusqu’ici. La mise en place d’une antenne-relais afin d’installer un trafic de vente de téléphones portables améliorera sa situation financière. De plus, son ascension fulgurante influera sur son statut au sein du quartier. Il devient vite important. Pour preuve, il ne se fait plus appeler Bastardo, mais Mohsen. Ceux qui le raillaient il y a quelque temps encore le craignent.

La modernité est exposée avec sarcasme. L’utilisation des téléphones portables engendre folie et dérèglement chez les habitants du quartier. Ils en deviennent accrocs et vendent bijoux et autres objets de valeurs pour se les procurer. En se fiant aux nombres affichés de messages et d’appels reçus sur le téléphone d’un client, ceux-ci étant relevés à zéro, le mode de vie tranquille et traditionnel est comme contaminé par le parasitage d’objets pas si indispensables que cela.

Le réalisateur dépeint une vision pessimiste de l’être humain : Mohsen réussit finalement à s’imposer et à faire sa loi sans se différencier du caïd qui l’a précédé. Mohsen maltraite les femmes, rackette les habitants du quartier et les asservit par le chantage. L’histoire est un éternel recommencement et l’homme reste un loup pour l’homme. De son côté, le réalisateur ne s’attarde pas sur ces considérations morales. Il privilégie le mélange des genres avec habileté. Un conte social fantastique et initiatique réalisé avec finesse et efficacité.

Serge Roguet

Serge Roguet

Critique cinéma http://sergeroguet.centerblog.net

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